Repenser de fond en comble le management en entreprise ?

Deux enquêtes analysées dans L’Usine Nouvelle — réalisées par la CEGOS, l’une auprès de jeunes du monde du travail, l’autre auprès de DRH —, font écho à la conférence que donnait fin mai, à Landerneau, Hervé Sérieyx, devant un public d’étudiants et de chefs d’entreprises. Son thème rapprochait jeunes, entreprises et ancrage territorial. Les jeunes ont changé, constatait Hervé Sérieyx : est-ce un bien, est-ce un mal ? Peu importe : c’est une réalité à prendre en compte. L'étude de la CEGOS illustre aussi ces changements.
Apprendre à écouter…
Le travail n’est plus ce qui est prioritaire dans leur vie. Ils sont devenus des "consommateurs de leur employeur " auquel — pour 71 % d’entre eux — ils resteront fidèles tant que celui-ci tiendra ses promesses. L’autorité managériale n’est plus acceptée naturellement : il faut faire preuve préalablement de sa compétence… et savoir écouter. Car si la rémunération est un point essentiel, "les deux premières raisons [citées] pour changer de poste de travail sont la dégradation de l'ambiance et le manque d'intérêt du travail".
Révolution Internet et positionnement hiérarchique
Enfin, last but not least, il faut prendre la mesure de la révolution Internet et de ses conséquences. "Ainsi, interrogés sur leurs attentes en matière de management, explique l’article, ils plébiscitent les personnes ressources plutôt que le manager traditionnel. Autrement dit, rien ne vaut pour les jeunes un expert pour résoudre un problème. Autre traduction de ce phénomène : les collègues sont ceux en qui les jeunes salariés font le plus confiance (53 % les citent en première réponse et 90 % les citent) devant le manager de proximité. En revanche, la DRH n'est citée que par un petit dixième."
Le management traditionnel a du plomb dans l’aile ? Vive le “management collaboratif” ! Certaines entreprises ont déjà franchi le pas, comme Dassault Systemes, qui a introduit un management basé sur la contribution de chacun à la vie active des différentes "communautés" de l'entreprise.
Se préparer aux nouveaux rôles du management
La nouvelle donne modifie ainsi profondément à la fois le rôle de l’encadrement et ses façons d’intervenir : organiser, réguler, faciliter les échanges et les apprentissages collaboratifs — notamment par l’utilisation appropriée des outils informatiques — devient un enjeu majeur pour les entreprises. Toutes n’y sont pas également préparées : c’est pourtant un tournant à ne pas manquer ! "La génération montante donnera à l'entreprise à hauteur de ce que celle-ci leur propose. Voilà les responsables prévenus. A eux d'agir, car une fois la crise finie, et les papys boomers partis, les jeunes auront à nouveau un marché du travail en leur faveur", conclut l’auteur de l’article.
Si l'invention d’un nouveau style de management semble une nécessité incontournable, prenons garde cependant à ne tomber dans l’effet de mode. Les questions posées par les jeunes, — besoin de confiance, besoin de sens — ne sont-elles pas, somme toute, “éternelles” ? A cet égard, les nouvelles technologies de l'information ne sont qu'un outil, parfois à double-face ! Elles permettent un fonctionnement plus collaboratif, mais encore faut-il que la culture de l'entreprise et les compétences du management le stimulent. D’autres pistes sont également pertinentes et à relier entre elles : approfondir les valeurs fondamentales de l’entreprise — les jeunes comme les moins jeunes ont besoin de mettre du “sens” sur leur travail —, stimuler la recherche d'innovation, s'inspirer du "principe de subsidiarité” dans les mécanismes de décision, retrouver l'éthique du “compagnonnage”, etc., autant de voies non exclusives les unes des autres pour prendre en compte la complexité de l’entreprise et des interactions entre le management et… tout le reste !
Dans les semaines à venir, nous reviendrons sur ces questions. Et, dès la semaine prochaine, vous pourrez lire les réponses qu'à sa façon, Paul Champs, homme d'entreprise s'il en est, apporte indirectement à cette réflexion.